Que se passe-t-il ici ? Il n'y a pas de petit train-train quotidient, ici on haït la routine ! A Grasi il se passe plein de trucs nouveaux en permanence. Et c'est heureux, parce que l'hiver est si long que nous serions déjà tous morts d'ennui depuis longtemps.
Par exemple, si tu vas dans les sous-sols de Grasi, à part les fantômes qui se manifestent de temps à autres, il y a le chantier du sauna qui avance tranquillement mais sûrement (à la lettone). Ainsi, sur la porte, depuis des mois, tu peux lire "Usmanibu, notiek remonts !" qui doit vouloir dire "Attention, réparation en cours". Il n'y a pas indiqué la durée des travaux comme sur les panneaux du Conseil Général du Gers. Par exemple: "Début des travaux 2007, fin des travaux 2012".
L'autre jour, tout à coup, les carreleurs sont arrivés alors qu'on ne s'y attendait vraiment pas: "Déjà ?". Lorsqu'ils ont vu que j'allais faire la photo, l'un posa et l'autre se retourna pour faire semblant de travailler. Si le patron venait à voir la photo ?
Les Français n'ont pas trop à s'inquièter de leurs patrons qui se barrent avec leurs entreprises dans les pays où la main d'oeuvre est moins chère, attendez un peu, une fois qu'ils auront fait leur expérience en y laissant des plumes, ils reviendront c'est certain. Des archarnés au boulot comme les Français je n'en ai jamais vu ailleurs. Ils en gaspillent c'est vrai, mais ils bossent pour en gagner d'avantage ! Lors de mes périgrinations j'ai rencontré des chefs d'entreprises français qui nous avait fait le coup de partir faire fortune à l'Est. L'un d'eux m'a avoué: "Nous avons fait l'expérience, mais malgré les bas salaires qui semblaient attrayants, les résutats de notre entreprise sont décevants. Nous allons repartir en France. Pas de rendement, pas de gens responsables, la plupart viennent bosser quand ça leur chante...il reste de sérieuses séquelles du régime soviétique." (Et si c'était les Lettons qui avaient raison ?)
Le contre-exemple Genadijs. Nous, dans les sous sol de Grasi, nous avons un mec sympa, Genadijs. Tranquillement durant les 6 ou 7 mois d'hiver, du matin au soir, il fait son boulot de chauffagiste, il coupe son bois, remplit sa chaudière, se fait aider le week end par quelques enfants à préparer son stock s'il le faut. Il n'arrête jamais et finalement il est performant ! En plus il est toujours souriant et prêt à rendre service ! Une perle, notre Genadijs ! Je ne sais pas s'il est unique en Lettonie, mais en tous cas, on a de la chance, il fait partie de notre équipe. J'aime bien Genadijs; De temps en temps il vient dans mon bureau et me raconte des tas de trucs que je devine à peu près grâce à mon vocabulaire letton limité. Mais il arrive toujours à glisser quelques mots connus dans ses longues tirades et tout s'arrange. Sinon, nous faisons appel à une interprète.
Dans les bureaux, quand il ne fait pas trop froid, on peut même quitter le manteau ! Sauf ce matin quand-même... En ce moment je suis dans les devis. Des devis par çi en lats, d'autres par là en euros, je prépare la saison de travail sur la ferme. La saison ? C'est de mai à octobre. Alors, quand enfin le beau temps est là, il faut rattraper le temps perdu. En Lettonie, la nature fonctionne comme ça, nous aussi !
La musique adoucie les moeurs, c'est bien connu. Ainsi, le soir après le repas, notre virtuose Mircea se met au piano de Klavas et entame la cinquième symphonie: "Pot, pot, pot, pot !"