Alors que les cloches carillonnent la joie des fêtes, Et que le ciel resplendit de mille feux, Un ange pâle erre dans les rues Le cœur étreint d’une souffrance infinie. Nul endroit où reposer sa tête, il est las infiniment, De son long voyage céleste : Le Sauveur ici-bas nous l’envoie. Chargé des présents Que chaque âme céleste lui a remis. A lui maintenant de nous les répartir : Pour l’un, voici de l’or, pour l’autre l’argent, la soie. Et tous en redemandent encore : « Donne, donne, j’aime tellement l’or, A moi l’argent, les soies et les velours, - A moi les plus grands honneurs ! » Oui, l’ange donne, il donne tout ce qu’il a. De ses richesses il n’est guère avare. En aurait-il eu davantage, Qu’il aurait comblé tous ces désirs. Autour de lui, il voit une foule avide Espérant encore quelques cadeaux. Alors désespéré, confus, honteux, L’ange couvre de ses mains son pâle visage. Contre les haillons d’un pauvre hère,- Il échange encore sa toge immaculée – Des biens précieux qu’il possédait, Tout, à présent, est distribué. | Ah, mais non ! – tout au fond de son cœur Un joyau précieux se dissimule encore ….. Le Saint Amour Céleste ! Y aurait-il quelqu’un pour le revendiquer ? Personne !…. Et l’ange dit à la foule : « Je vous donnerai l’amour ! Venez, je vous en prie, embrassez mes lèvres, Elles détiennent le baiser du Sauveur !… » De tous côtés la foule se disperse, Et l’ange reste seul. En haillons, méconnaissable, Ignoré de tous…. Il erre sur la plaine enneigée, Dans la nuit glacée des larmes perlent à ses yeux; Il aimerait prendre son envol, Pour lui, la fête n’est pas ici. Les cieux, tout là-bas, se parent de lumière, La gloire du Fils y resplendit, Et l’ange s’élève vers elle, Et se prosterne au pied du trône. Et Le Christ élève sa voix : « Tu me reviens de cette terre Si épuisé, si amaigri, Et en haillons, comme jadis Moi ! »
Jānis Poruks traduit du letton par Anita Klavins |
PORUKS, Janis [LETTONIE] (Druviena, 1871 - Tartu, 1911). Auteur de poèmes méditatifs et de poèmes d'amour, dont plusieurs furent mis en musique (Dzejas [Poèmes], 1906). On lui doit aussi des nouvelles, des récits, un roman psychologique (Riga, 1899/1907) et un drame historique.